En la détaillant ostensiblement, elle songeait à la mèche de cheveux salée de sueur qui collait à son front, à la mollesse de ses seins tendus contre son tee-shirt, à la lassitude de ses jambes, au poids de sa fatigue après plusieurs heures de service qui lui pressait le corps de mille douleurs secrètes. Elle admirait la prestance de ses mains qui jonglaient entre les verres et les cartes de crédits, toujours humides d’eau de vaisselle ou d’alcool. Il était facile pour elle d’apprécier le corps des femmes, un corps émotionnel, de les sentir, comme elle se ressentait elle-même, s’étirant sous sa peau.
août | 2022
Je n’avais jamais vu comme mon corps était pâle. À deux trois endroits pourtant, il y a du contraste. Les tétons d’abord, vineux, craquelés, frappent l’imagination. En descendant, le croissant vacillant du ventre des grossesses se gausse de la pesanteur, je le caresse, comme une cicatrice de guerre. Puis vient la jungle tiède du bas-ventre aux odeurs de forêts qui jamais n’a vu la lumière crue et chaude du soleil. Tu m’as appris à me laver entièrement nue. Un océan de nudité. La vapeur d’eau tiède emplissant la salle de bain calfeutrée. Dans la glace, fulguraient nos simagrées de grâce puis la beauté des gestes vulgaires, le quotidien des corps. Les bruits, les fumets, les agapes. Et maintenant je danse nue, seule et sans miroir, dans la clarté du jour. De grands gestes graves, engourdis de sommeil. J’apprécie l’indolence, le va-et-vient des bras, le poids du corps, l’aplomb des cuisses. Tout est lent et se mue en offrande.
août | 2022
le début c’est quand je choisis un vêtement pour me défendre de la journée pour qu’elle ne soit pas un naufrage des manches longues à fleurs avec des épaulettes le ventre nu des contrastes ahurissants une bouée de sauvetage qui colle au corps sauf le décolleté plongeant c’est pour noyer les hommes question de survie un m’as-tu-vu-camouflage gonflé d’hormones du venin dans le nombril un ventre à boire ce n’est pas original ce n’est pas surprenant toutes les femmes le font elles font ça chaque matin avant de déposer les enfants à l’école avant de répondre à toutes les promesses les sollicitations alors cherchez la bête enfin cherchez la chose protéiforme qui respire âprement sous les pétales
mai | 2024